Sommes-nous prêt à passer à la slow cosmétique ?
Bon, force est de le constater, je ne suis pas montré très assidu quant à la rubrique "Lecture beauté" que je voulais introduire de manière plus régulière sur cette Planète. Et cela pour une seule et simple raison : je n'arrive pas à trouver le temps de lire. Je crois que la dernière fois que j'ai lu un bouquin juste pour le plaisir (un roman d'Harlan Coben si ma mémoire est bonne), ça remonte à l'année dernière sous le soleil de Grèce. Autant dire une éternité... Il y a quelques semaines, j'ai reçu "Adoptez la slow cosmétique", le bouquin de Julien Kaibeck (que certains d'entre vous connaissent sûrement sous sa casquette de blogueur avec L'Essentiel de Julien). Bon, au début, je me suis dit que cela ne pouvait pas m'être destiné : un bouquin avec le mot "slow" dans le titre pour un hyperactif toujours en train de courir comme moi, c'est un peu comme proposer à DSK de se lancer dans la lecture d'un ouvrage sur l'abstinence : peine perdue ! Mais bon, ma curiosité a été plus forte et je me suis donc lancé dans ces 237 pages (bon, j'avoue, j'en ai survolé certaines mais je vous expliquerai tout à l'heure pourquoi).
La "Slow cosmétique", voilà là un mouvement qui rencontre un succès grandissant depuis quelques temps. Inspiré de la mouvance Slow food, il nous invite à reconsidérer notre manière de consommer "beauté" en adoptant des petites astuces facile à adopter au quotidien. Enfin, sur le papier en tout cas... Passage obligé avant la création d'un nouveau modèle de consommation, la remise en question du système existant. Du coup, pendant la première partie du bouquin et sous la plume acérée de Julien, la cosmétique dite "traditionnelle" prend cher. Très cher même ! En résumé, elle serait inefficace, dangereuse pour notre santé et pour l'environnement. Forcément, comme dirait Brice de Nice, ça casse. Après une préface de Jean-Pierre Coffe (que j'aime beaucoup pour sa grande gueule mais qui a quand même perdu pas mal de crédibilité à mon sens depuis qu'il nous vante les mérites de Leader Price), Julien avance plusieurs arguments qui font mouche. J'ai beau tenir un blog beauté et, encore pire, bossé dans l'industrie cosmétique, je suis obligé de le rejoindre sur certains points, ne serait-ce que par simple honnêteté intellectuelle.
Aussi, lorsqu'il écrit que chaque saison, un nouveau produit miraculeux en chasse un autre sorti trois mois plus tôt, et que les millions d'euros investis en campagne publicitaire font naitre en nous un désir irrépressible de le posséder, je valide. Lorsqu'il évoque la possibilité que l'identification à une égérie ou le coup de coeur pour un magnifique packaging pèsent parfois plus dans nos motivations d'achat que le décorticage de la formule INCI, je partage son analyse. Lorsqu'il suppose que la multiplication à l'infini des routines qu'on nous impose (un nettoyant, un tonique, un sérum pour le visage, un autre pour le contour des yeux, un contour des yeux, une crème hydratante, une BB cream...) est parfois davantage dictée par des considérations mercantiles que par nos réels besoins cutanés, je suis loin de m'en offusquer. Et il en est encore de même quand Julien écrit que la multiplication des produits sur nos étagères a fatalement un impact sur l'environnement.
Suis-je pour autant d'accord avec lui sur toute son analyse ? Bah non, ce serait trop simple sinon ! Car si je ne renie pas la part de marketing dans l'industrie de la beauté, je crois aussi que les millions d'euros investis en recherche développement ne le sont pas en vain. Et que même si cela se fait à coup de chimie, les molécules qui sortent des labos cosmétiques sont quand même sans cesse plus efficace. Que, contrairement à ce qu'il laisse parfois entendre, on ne sait pas de manière ferme et définitive ce qu'il en est des parabens et que s'ils sont aujourd'hui enlevés de la plupart des soins, c'est plus pour rassurer le consommateur effrayé qu'autre chose. Que même s'il évoque "sa croissance la plus forte", la beauté bio reste aujourd'hui encore, malgré une offre grandement démocratisée, cantonnée à 5 petits pour cent du marché, preuve selon moi que la naturalité d'un produit n'est aujourd'hui pas suffisamment mobilisatrice pour faire changer les habitudes et les exigences des beauty addicts. Pas mal de points de divergence donc !
Rien de bien étonnant en même temps car on sait avec Julien que si l'on partage le même amour de la cosmétique, on a chacun notre vision bien tranchée de la chose. Il y a en revanche une chose sur laquelle on se retrouve, c'est la nécessité de donner à tout à chacun les clés pour acheter en toute connaissance de cause. Et sur ce point, mon camarade Julien est une référence de par sa capacité à vous expliquer en moins de temps ce qu'il n'en faut pour le dire ce que contient exactement votre pot de crème. Pour moi, c'est là la partie la plus intéressante du bouquin (chapitre 2, le premier étant lui consacré à l'explication des besoins de la peau). Huiles minérales, alcools, silicones, polymères, émulsifiants, conservateurs, parfums, colorants... il nous donne les astuces pour identifier en un coup d'oeil chacun des actifs d'un produit de beauté. Message de vigilance contre les mises en avant parfois excessives d'actifs naturels qui ne représentent souvent qu'un élément utilisé à faible dose, estimation de l'honnêteté du rapport formule / prix, distinction entre naturel et bio qu'il est toujours bon de rappeler... plein de bon sens dans cette partie très pédagogique et accessible même - et surtout d'ailleurs - aux néophytes de la beauté.
Place ensuite à un passage en revue des différents labels bios, qu'ils soient français, européens (un bonjour à Angela Merkel si elle nous lit) ou même mondial. Toujours intéressant même si j'aurais bien aimé que mention soit faite aux produits qui parviennent à obtenir ce label mais pour qui cela est avant tout un prétexte marketing plus que la preuve d'un engagement sincère (les Diadermine Bio et compagnie). On arrive alors page 81, et là, c'est le drame : le moment où il va falloir changer nos habitudes pour adopter les codes de la slow cosmétique. "Vivre slow signifie vivre plus lentement et plus harmonieusement, le plus souvent en accord avec la nature" nous dit Julien. Je ne me braque pas même si je me sens plus proche de la "dance cosmétique" ou "pop/rock cosmétique" que du slow mais bon...
Quelques lignes plus loin : "L'attitude la plus slow serait de n'avoir recours qu'à des matières naturelles et brutes pour la beauté". Euh non, je crois que ça va pas être possible là ! Pas pour moi en tout cas... "Des huiles végétales et essentielles, des beurres, de l'argile, du sucre ou du miel...", je ne dis pas que cela ne m'amuserait pas de le faire de temps en temps mais sur l'ensemble de ma routine beauté, ce n'est même pas la peine de l'envisager l'once d'une demie-seconde. J'aime autant me transformer immédiatement en Massimo Gargia. Euh, quoi que non, je vais peut-être plutôt me soumettre à la cosméto home made finalement ! Plus sérieusement, à partir de là, le livre ne propose presque plus que des recettes qui m'ont conforté dans l'idée que la cosméto homemade n'était juste pas faite pour moi. Entre les ingrédients que j'imagine déjà hyper pénibles à réunir, les temps de mélanges, de préparation et parfois même de cuisson, les durées de conservation plus limitées... il faut quand même avoir sacrément la foi.
Attention, je respecte totalement toutes celles et ceux qui se retrouvent dans cette manière de consommer beauté mais je suis juste perplexe sur le fait qu'elle devienne la manière la plus répandue de prendre soin de sa peau... Un exemple parmi tant d'autres Mesdames : vous voulez vous faire une eau de rinçage pour avoir les cheveux bien brillants. Armez vous de patience car il nous faut commencer par faire bouillir un litre d'eau minérale, puis y ajouter une fois sortie du feu une grosse poignée de fleurs de camomille séchées (lol, la blague à trouver ce bordel) ou de romarin séché + 3 cuillères à soupe de vinaigre bio (cidre ou pomme, vous avez le choix) + 2 tranches de citron si vous avez les cheveux à tendance grasse. N'espérez pas l'utiliser dans la foulée (déjà parce que je vous rappelle qu'à ce stade du jeu, l'eau est encore presque bouillante, ce serait con quand même de s'ébouillanter juste pour avoir le cheveu rutilant !) mais couvrez votre casserole et laissez macérer 4 heures (le temps de regarder Titanic en entier et même les bonus du DVD en prime!). Julien nous invite ensuite à "filtrez la préparation et la transvasez dans une bouteille (celle que vous avez utilisé au départ j'imagine)... Vous imaginez un peu la logistique que cela demande. Alors que, et il faudra que j'en parle à Julien à l'occasion, l'on trouve de très bons vinaigres de rinçage à tous les coins de rues ! Je sais pas vous mais franchement, j'hésite pas l'once d'une seconde pour ma part !
Encore plus dingue de mon point de vue, ce passage sur la conservation des produits, où Julien conseille de placer l'émulsion réalisée dans le réfrigérateur. Et si malgré cela des bactéries ont réussi à y rentrer ? Et bien tenez vous bien : "C'est un peu dégoûtant mais vous ne risquez pas la mort". Euh, z'êtes gentils les mecs mais la crème visage façon roquefort, vous comptez pas sur moi sur ce coup ! Rendez-moi sur le champ mes parabens chéris !!! Heureusement, entre toutes ces recettes se cachent des petits dessins et des tuyaux pour optimiser l'application de nos produits par de petits gestes. Une sorte de Yoga Face, de gymnastique faciale plutôt intéressante et là aussi, facile à comprendre.
Au final alors, on l'achète ou pas ce bouquin ? Si vous êtes fan de cosméto home made, oui, sans la moindre hésitation. Si ce n'est pas le cas, c'est un peu plus difficile à trancher : la première partie du bouquin est clairement intéressante même si forcément partisane puisqu'introductrice de la nécessité d'adopter la slow cosmétique. Cela reste néanmoins un investissement très correct (15€) et justifiable pour celles et ceux qui chercheraient un guide pour décortiquer leurs pots de crème. Je sais qu'on a déjà eu l'occasion d'aborder par ici le sujet de la cosméto homemade mais peut-être vos positions de l'époque ont elles évoluées depuis ? Est-ce que vous vous reconnaissez dans le discours de la slow cosmétique et vous sentez de plus en plus vigilant sur les (sur)promesses de l'industrie cosmétique ? Vous sentez vous prêt(e)s à abandonner petit à petit vos produits de beauté conventionnels pour vous tourner vers des huiles végétales et essentielles ? Ou, un peu comme moi pour le coup, estimez-vous que ce mouvement, même s'il grandira sûrement un peu dans l'avenir, restera néanmoins marginal, le commun des mortels préférant se contenter de produits clés en mains qui, même s'ils ne sont sans doute pas parfaits, font généralement plutôt bien leur boulot ? Le débat est ouvert, à vous de jouer !
PS : vous retrouverez Julien (enfin, s'il n'est pas trop fâché après moi!) dans les tous prochains jours puisque la rubrique "La fin justifie les moyens" (vous sembliez avoir bien aimé le premier item juste ICI) va faire son retour. Sur le ring cette fois, les patchs contours des yeux Talika VS Klorane !
PS : vous retrouverez Julien (enfin, s'il n'est pas trop fâché après moi!) dans les tous prochains jours puisque la rubrique "La fin justifie les moyens" (vous sembliez avoir bien aimé le premier item juste ICI) va faire son retour. Sur le ring cette fois, les patchs contours des yeux Talika VS Klorane !
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